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Accueillir et Accompagner les personnes placées sous main de justice

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Si « l’objet addiction » est complexe, le statut social du sujet « addict » ne va pas de soi non plus, lorsqu’il a à faire avec la justice et qu’il devient à la fois « malade » et délinquant. Les acteurs du soin sont amenés à composer avec ces deux registres qui les confrontent à un ensemble de paradoxes et notamment celui de rencontrer une personne qui ne le souhaite pas.

 

 

Si dans l’idéal le consentement de la personne semble indispensable à son engagement dans une démarche de soin, l’expérience montre qu’accueillir quelqu’un qui n’en a pas envie crée néanmoins une opportunité de rencontre, dont l’usager peut se saisir… ou pas. 

Les rencontres contraintes ne se réduisent d’ailleurs pas à l’obligation judiciaire, puisque la venue d’un grand nombre de patients est induite voire obligée par un tiers (parent, employeur, école etc.). 

 

Les soignants eux, ne sont obligés que d’une chose, celle d’accueillir tous ceux qui franchissent le seuil de l’institution et leur offrir un espace de parole. Ainsi, il est de la responsabilité des dispositifs spécialisés de donner le maximum d’occasions à des consommateurs de produits psychoactifs de rencontrer ceux qui peuvent leur venir en aide et donc de proposer aux personnes placées sous main de justice des interventions qui leurs permettent de créer du sens au-delà de la sanction.

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Si l’accompagnement des personnes placées sous main de justice soulève un ensemble de questions et de paradoxes, il permet cependant au travers de ses différentes modalités d’ouvrir des espaces de libertés là où à priori il n’existe que de la contrainte. 

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La permanence dans les locaux du SPIP à Marseille

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L’objectif était de favoriser l'information éducative et l'orientation sanitaire des personnes sous main de justice ayant commis des délits liés à la consommation d'alcool ou une autre substance psychoactive. 

Ainsi, la psychologue du CSAPA assure une permanence trois demi-journées par mois dans les locaux du SPIP et reçoit en entretien individuel des personnes orientées par les conseillers d’insertion et de probation. Il est proposé :

  • Une information sur le(s) produit(s) et les risques associés

  • Une évaluation du comportement addictif

  • Une orientation vers un dispositif de soin approprié aux difficultés repérées, à la situation géographique, aux horaires d’ouvertures pour mettre en œuvre l’obligation de soins.

 

Mais en préambule, il s’agit de dépasser les à priori respectifs, de travailler sur les représentations de la justice et du soin et d’éclaircir les confusions possibles. Elles peuvent être générées par la présence du soignant dans les locaux de la justice mais aussi par la manière dont les professionnels de la justice présentent cette permanence à la personne, d’où l’importance d’échanges réguliers avec eux sur l’articulation des pratiques. 

 

Malgré tout, cette permanence de proximité facilite la venue des personnes les plus réticentes à mettre en place ou à maintenir l’obligation de soins, favorise leur adhésion, voire, les amènent à dépasser le cadre contraignant pour mener une réflexion sur elles-mêmes.

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La permanence au Tribunal de Grande Instance de Marseille 

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Depuis plus de 20 ans, Addiction méditerranée tient une permanence d’accueil au sein du TGI quatre demi-journées par semaine. Les personnes, majoritairement des jeunes adultes, sont orientées par le délégué du procureur dans le cadre d’une composition pénale assortie d’une amende ou d’un stage de sensibilisation. A la différence des personnes suivies dans le cadre d’une obligation de soins qui s’inscrit dans le temps, l’obligation ici réside dans le rendez-vous au Tribunal.

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Ce qui intervient ensuite relève de ce qui se passe entre la psychologue et la personne accueillie. Ce rendez-vous est globalement vécu par les personnes comme une contrainte supplémentaire à la condamnation. Cependant, l’objectif sera différent selon que l’évaluation révèle ou non une problématique addictive. Si pour certains jeunes, le rendez-vous est une occasion d’échanger sur ce pourquoi ils sont là dans une visée éducative, pour d’autres, l’enjeu de la rencontre sera de créer la surprise, d’instiller du doute là où il n’y a que des certitudes et d’amorcer une alliance thérapeutique qui génère du questionnement et incite la personne à poursuivre la démarche.

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L’intervention dans le cadre du CSAPA référent au Centre de Détention de Tarascon

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L’activité consiste à accompagner les personnes détenues dans la préparation de leur sortie et à coordonner les différents acteurs impliqués dans le projet. Il s’agit de prendre en compte le suivi antérieur si celui-ci existe et de rassembler les conditions pour mettre en œuvre l’accès, le maintien et la continuité des soins. Quelles soient orientées par le SPIP, par les unités sanitaires ou qu’elles viennent d’elles-même par le bouche à oreille, les personnes sont rencontrées pendant leur détention par le ou les deux professionnels du CSAPA (psychologue et éducatrice).

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Les entretiens ont lieu soit au sein de l’unité sanitaire, soit dans le bâtiment socio-éducatif, ce qui favorise le lien avec les différents partenaires. Des échanges quotidiens ont lieu avec le SPIP autour des situations et des rencontres régulières sont mises en place avec les professionnels soignants des unités sanitaires somatiques et psychiatriques dans le but de faciliter les parcours, travailler sur les représentations et analyser les pratiques.

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Par ailleurs, les relais avec les structures extérieures sont organisés notamment en permettant à la personne de rencontrer ses futurs interlocuteurs à l’extérieur lors de permissions et ce afin d’atténuer d’éventuelles appréhensions au moment de la sortie. Ces relais sont facilités par la participation aux réunions mensuelles du réseau addiction du territoire. Les professionnels veillent aussi à ce que les actes de liaison (ordonnance relais, courriers etc), les démarches administratives (ouverture des droits CMU) soient réalisés et que la question de l’hébergement soit anticipée.

Enfin, l’accompagnement à l’extérieur le jour de la sortie jusqu’au nouvel hébergement ou dans les premières démarches de soins est parfois nécessaire pour soutenir la personne dans ce changement de situation.  

 

L’hébergement des personnes en appartement thérapeutique dans le cadre d’un aménagement de peine

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L’hébergement des personnes alors qu’elles sont encore sous écrou constitue une nouvelle modalité de coopération avec la justice. Que ce soit dans le cadre d’une mesure de placement extérieur ou de placement sous surveillance électronique, l’hébergement en appartement thérapeutique permet aux personnes sortantes de détention de petit à petit retrouver leur autonomie et restaurer des liens sociaux en bénéficiant d’un accompagnement global du CSAPA.

 

A la différence de l’obligation de soins, l’aménagement de peine fait l’objet d’une demande de la personne qui sollicite les différents partenaires pour l’aider à construire son projet. Préparé durant la détention, il doit faire l’objet d’un accord du Juge d’Application des Peines.  La contrainte est donc située davantage au niveau du déroulement de la mesure qu’au niveau du soin. Un travail avec le SPIP a permis d’aboutir à une convention qui allège au maximum les obligations. Elles sont présentées à la personne et font l’objet d’un contrat distinct du projet de soin et du contrat de séjour.

 

Si le dispositif peut paraître lourd (signalement à la justice en cas d’absence non prévue de plus de 4 jours, demande d’autorisation pour s’absenter temporairement du logement etc.) et que la liberté sous écrou ne va pas de soi, les échanges réguliers avec le SPIP autour des situations permettent d’adapter au fur et à mesure les modalités de l’aménagement de peine.

 

Le suivi en CSAPA dans le cadre des obligations de soins

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Une part importante de la file active est en obligation de soins. Cette mesure contraint la personne à se soumettre à des soins pendant plusieurs mois, voire plusieurs années. Sans se précipiter, le professionnel amène la personne à trouver un intérêt à cette rencontre, au-delà de l’attestation qu’elle vient chercher. Malgré la contrainte, la personne peut accepter l’idée de se saisir l’occasion qui lui est donnée de se questionner sur ce pourquoi elle est là et de faire le point sur ses difficultés. L’exploration des usages et de leurs conséquences, lui permettra peut-être de trouver des bénéfices à s’engager dans un processus de changement.

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